Article dans Apostrophe45 le 26 janvier 2017 retraçant le débat organisé par la rédaction entre David Jacquet pour Benoît Hamon, et moi-même pour Manuel Valls dans le cadre des primaires.
QUAND LA PRIMAIRE FAIT DEBAT
Avant le 2e tour de la primaire de la gauche, apostrophe45 a organisé un débat entre les soutiens locaux de B. Hamon et de M. Valls.
En vue du match qui opposera « les deux gauches », dimanche 29 janvier lors du second tour de la primaire, apostrophe45 a choisi de donner la parole, sous la forme d’un débat, à David Jacquet, mandataire de Benoît Hamon dans le Loiret, et à Yann Chaillou, soutien de Manuel Valls à l’échelle départementale. Tous deux ont répondu aux questions des journalistes de la rédaction, afin d’apporter un éclairage sur chacun des programmes présidentiels des deux candidats. L’on notera des divergences fortes – d’aucuns préféreront parler de « nuances » – sur les questions économiques, sociétales ou encore environnementales qui témoignent de deux conceptions bien différentes au sein du Parti socialiste. Extraits.
Outre nos vidéos, dont chacun renvoie à une thématique (immigration, dépénalisation du cannabis, environnement, questions sociales), voici aussi quelques sujets sur lesquels Yann Chaillou et David Jacquet ont pu échanger, voire se rassembler.
La laïcité
Yann Chaillou. « La laïcité, elle est là pour protéger, on ne peut pas y adjoindre de synonyme. Il n’y a pas de synonyme à la laïcité. C’est d’être libre de croire ou de ne pas croire. Sauf que l’on voit bien là où la droite veut nous emmener. Il faut être ferme sur la laïcité et c’est ce que j’aime dans le discours de Manuel Valls, c’est qu’il est clair là-dessus. Ce n’est pas normal qu’un homme politique de premier plan comme François Fillon, dise : « Je suis chrétien, votez pour moi ! ».
David Jacquet. « Comment distingue-t-on aujourd’hui un intégriste catholique, un intégriste juif, un intégriste musulman ? C’est extrêmement compliqué, je ne vais pas sur le chemin du bout de chiffon, du bout de tissu, je vais plutôt sur le chemin de la propagande, ce de qui est dit et de la manière dont tout cela est dit. Et c’est là-dessus, où ça reste compliqué, non pas pour les musulmans seulement, mais pour l’ensemble des religions, notamment les intégristes catholiques qui prônent un certain nombre des choses, sur l’IVG par exemple, et qui produisent des informations fausses sur des sites Internet. (…) Il ne faut pas tomber dans les amalgames proposés par la droite. »
Le 49.3 citoyen confronté au cas de Notre-Dame-des-Landes
David Jacquet. « Le but, c’est quand même de réconcilier les citoyens français avec la politique, c’est leur permettre de réinterpeller nos décideurs sur des sujets d’évolution sociétale. Être acteur, ce n’est pas que voter une fois tous les cinq ans (…) La proposition mérite d’être approfondie en y mettant un cadre plus détaillé, c’est vrai, ce n’est pas le cas en effet. On a défini le critère de 1% sans préciser si ce 1% se rapportait à un département ou à la moitié des départements de France, par exemple. On n’a pas défini tous les contours. Ceci étant, sur Notre-Dame-des-Landes, les contours de la consultation créent encore le débat : qui a été consulté ? Tous les citoyens impactés de près ou de loin n’étaient pas dans le périmètre de consultation. Est-ce que nous, Loirétains, nous avions aussi notre mot à dire sur Notre-Dame-des-Landes ? Sur les différentes études, il y a aussi un problème qui touche l’impact économique sur ce territoire. »
Yann Chaillou. « Le projet de Benoît Hamon prévoit 400.000 citoyens minimums. C’est moins que la participation à la primaire de la Belle alliance populaire. Cela me semble très dangereux, pas du tout représentatif, il faut faire attention. Je suis partisan de ce que disait François Hollande, et Manuel Valls, y a quelques semaines, qu’il fallait mieux privilégier les référendums locaux pour tous les grands projets notamment portés par l’Etat pour connaître l’avis des citoyens, on sent qu’il y a ce besoin-là. Le plus important, ce n’est pas de créer des « 49.3 citoyen », c’est de faire en sorte qu’il y ait une vraie représentativité de nos concitoyens dans la vie politique. Nous sommes dans une démocratie représentative et pourtant le niveau de représentation n’est pas le même pour tous. Est-ce que les jeunes sont représentés, est-ce que les femmes sont représentées, est-ce que les salariés sont représentés ? Il y a un niveau de représentation qui n’est pas identique pour tous.
La police des discriminations
David Jacquet. « Le sentiment pour un certain nombre de nos concitoyens d’être discriminés est fort. Il se mesure par une réalité, les dernières études l’ont montré : la première discrimination à l’emploi est liée au handicap, puis à la différence homme-femme, et le dernier point à la diversité républicaine, autrement dit à la couleur de peau ou les origines. (…) On va retrouver sur le logement la même hiérarchie des discriminations. Sous l’impulsion de Martin Hirsch, un numéro vert avait été mis en place mais les procédures juridiques étaient extrêmement compliquées. Il y a eu quelques condamnations. Il faut trouver un système qui puisse capter toutes ces discriminations et y apporter des réponses. »
La police de proximité
Yann Chaillou. « Manuel Valls propose de rétablir la police de proximité grâce à la création de 5.000 postes de policiers et gendarmes. »
Le vote des étrangers aux élections locales
Yann Chaillou. « Quand on fait une proposition depuis trente ans et qu’on n’est toujours pas capable de la mettre en place, il faut au bout d’un moment arrêter de la proposer. Il faut être honnête entre nous. On n’y arrive pas. On le voit. Mitterrand, Jospin et Hollande n’y sont pas parvenus, à chaque fois qu’on était au pouvoir, nous n’y sommes pas arrivés. Il faut regarder les choses en face. J’avais pourtant milité pour cela en 2012. (…) Je crois que le plus important aujourd’hui, vraiment, c’est de faire en sorte que tout le monde puisse participer à la vie citoyenne. Ce n’est pas normal qu’il n’y ait pas plus de jeunes députés, plus de femmes députées, ce n’est pas normal. »
David Jacquet. « Moi, je n’abdique pas. Le citoyen d’origine marocaine qui habite Orléans, je trouve ça logique qu’il puisse voter aux élections municipales. (…) Être citoyen, est-ce que ça se résume à une nationalité ? Quand on paie des impôts locaux, qu’on est président d’une association locale, et qu’on ne peut pas désigner qui va être premier magistrat de la ville, moi, ça me pose question et j’aimerais qu’on puisse un jour arriver au bout de ça. »