Depuis le 1er juillet, sur décision du Gouvernement, la vitesse maximale autorisée sur l’ensemble du réseau bidirectionnel sans séparateur central a été abaissée à 80 km/h. Cet été, sur la route des vacances, j’ai pu discuter en famille, entre amis et avec des covoitureurs de la mesure. J’ai également testé en tant que conducteur les 80 km/h, si souvent décriés au cours des derniers mois. Cela m’amène à exposer plusieurs remarques :

  • Je n’aime pas que l’on fasse croire qu’en matière de sécurité routière tout se fasse par simple intérêt pécuniaire pour l’État. Je partage en effet l’idée qu’un mort sur la route est déjà un mort de trop. Alors oui, il existe des lobbies dans ce domaine comme dans d’autres. Oui, il y a bien des sanctions financières si la règle n’est pas respectée, comme pour de nombreuses autres infractions. Mais l’objectif premier pour un Gouvernement quel qu’il soit est bien de diminuer le nombre de morts sur la route, sauver plus de vies. Les forces de l’ordre ont d’ailleurs multiplié les opérations de contrôle avec alternatives aux poursuites permettant aux contrevenants de ne pas être verbalisés sous réserve de participer dans la foulée à un atelier sur les 80 km/h proposé par la prévention routière.
  • Je n’aime pas que l’on créé de hiérarchie entre les morts. À écouter certains, il y aurait toujours plus important : la lutte contre le terrorisme, la lutte contre l’alcool ou le téléphone portable au volant. Il ne faut pas tout mélanger et tout opposer. Reste que la vitesse est la première cause des accidents mortels en France (31%), suivie de l’alcool (19%) puis des stupéfiants (9%) et que le réseau routier sur lequel les accidents mortels sont les plus fréquents est celui des routes bidirectionnelles sans séparateur central (55% de la mortalité routière). La mesure prend donc tout son sens !
  • Je note que d’autres mesures annoncées lors du comité interministériel de la sécurité routière seront mises en œuvre rapidement, parmi lesquelles : l’instauration de la vidéo-verbalisation des infractions liées au non-respect des règles de priorité de passage accordées par le code de la route aux piétons, et l’alternative à la suspension du permis de conduire suite à un contrôle d’alcoolémie positif, proposant d’équiper le véhicule d’un éthylotest anti-démarrage (EAD). Si je suis à titre personnel favorable à la tolérance zéro en ce qui concerne la consommation d’alcool avant de conduire, je me réjouis que l’on avance sur la prévention de ce fléau en matière de sécurité routière. Prévenir la fatigue me semble être aussi un enjeu important.
  • Je veux rappeler que les accidents de la route ont un coût social et financier dans la société. Il faut ajouter aux milliers de morts sur la route 72000 blessés chaque année, dont 25000 blessés graves qui subiront tout le reste de leur vie les séquelles ou le handicap. La sécurité routière c’est donc aussi un vrai sujet de santé publique. Par ailleurs, des dizaines de milliers de français-es ressentent la douleur d’avoir perdu à tout jamais un conjoint, un enfant, un parent, un ami, un collègue. Nous en connaissons toutes et tous.
  • Pour toutes ces raisons, je ne m’oppose pas aux 80 km/h même si je connais les risques de déconcentration (on a l’impression d’avoir plus de temps pour regarder les paysages) et même si je crois qu’il pourrait y avoir une flexibilité sur certaines portions de routes (comme en sortie de ville par exemple). Je sais que les mesures efficaces pour changer nos comportements de conducteurs sont les mesures dites de ruptures, ce sont aussi celles qui concentrent le plus d’opposition : port de la ceinture de sécurité obligatoire en 1973, abaissement à 50 km/h de la vitesse en agglomération en 1990, permis à points en 1992, déploiement des radars fixes en 2002. J’attends donc avec impatience les résultats de cette politique. Le Gouvernement s’est donné jusqu’en 2020 pour faire le point.